LES PIEDS-LOURDS

Le scaphandre à casque est apparu dès 1819. Il a été amélioré au fil du temps mais son principe de fonctionnement est resté le même durant près de 150 ans. Seuls le détendeur et le scaphandre autonome sont parvenus à le détrôner.



INTRODUCTION

Le scaphandre à casque est apparu dès 1819. Il a été amélioré au fil du temps mais son principe de fonctionnement est resté le même durant près de 150 ans. Seuls le détendeur et le scaphandre autonome sont parvenus à le détrôner. Depuis son invention et jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale, on ne songe pas à employer le scaphandre pour d’autres activités que le travail.

Certains croient trouver de l’héroïsme et de l'exceptionnel dans le métier de scaphandrier. Ils projettent leurs fantasmes sur des actions d'éclats et sur ce travail harassant. Le mythe du "Pieds-lourds" s’installe. Mais au quotidien, nous poussons notre fardeau devant nous, nous appartenons à la grande communauté des fourmis, des scarabées besogneux. Nous ressemblons à des forçats et non pas à des héros. Nous sommes des ouvriers de la mer, la main d'oeuvre bon marché, plus ou moins qualifié, les hommes à tout faire des petits et grands fonds.

Citation de Magnus Longhope, scaphandrier émérite.

Outre le sauvetage des cargaisons, le scaphandre à casque est employé, dès sa mise au point, pour des travaux de renforcement ou de construction des ouvrages portuaires, tels qu’assises de ponts, quais, écluses, ou encore pour la réalisation de phares et balises fixes.

Une autre utilisation importante du scaphandre concerne les travaux exécutés pour l’entretien ou la réparation des coques de navires. Les algues, les mollusques et autres animaux qui se fixent sur les carènes entravent la bonne marche des bâtiments. On juge utile de faire appel à des scaphandriers pour le grattage et le nettoyage des coques plutôt que d’échouer les navires régulièrement au bassin. Certaines avaries de coque peuvent être réparées provisoirement, voir définitivement par les scaphandriers.

Le relevage des navires coulés ou échoués, opération pratiquement impossible dans le premier cas et difficile dans le second, peut être envisagé d’une façon moins aléatoire dans la seconde moitié du 19ème siècle avec l’emploi des scaphandriers.

UTILISATION DU SCAPHANDRE

Les individus pratiquant ce métier sont généralement bien payés; leur salaire équivaut en moyenne, à deux fois celui d'un ouvrier, pour peu qu'ils exercent à temps complet. Bon nombre d'entre-eux ne deviennent pas scaphandriers par vocation mais par nécessité. La plupart sont marins et apprennent le métier sur le tas. Il faut des hommes capables de travailler sous l'eau, peu importe leur formation d'origine pourvu qu'ils soient de bons ouvriers et qu'ils sachent rapidement utiliser un scaphandre.

Le pécheur d'éponge, extrait du "Monde du Silence" du commandant Cousteau, source http://www.cousteau.org

L’utilisation du scaphandre à casque nécessite une attention et une mise en œuvre relativement importante, la moindre erreur risque d’entraver le bon déroulement de la plongée et de mettre en danger la vie du scaphandrier. Le respect des consignes suffit pour une utilisation correcte du scaphandre, l’exécution des gestes devenant automatique avec l’entrainement et l’expérience. Les jeunes scaphandriers profitent des conseils de leurs anciens. Cette corporation rassemble des hommes d’un sang froid extraordinaire.

LE BONNET ROUGE

Les scaphandriers deviendront aisément reconnaissables par la suite grâce à leur célèbre bonnet rouge (utilisé plus tard par un autre plongeur très médiatique, de renommée planétaire …).

Les bagnards de Toulon et de Brest ont été "utilisé" comme scaphandriers, notamment ceux qui étaient assujettis à de lourdes peines. Leur tenue vestimentaire comportait le fameux bonnet rouge. Ils restaient souvent de nombreuses heures dans l'eau et suffisamment profond pour subir un accident de décompression à la remontée. A cette époque, les maladies de décompression étaient mal connues. Leur perte ne causait pas de grand chagrin et ceux qui ne mourraient pas, devenaient bancroches, béquillards, aveugles ou sourds.

Par la suite cette tradition est restée car cette couleur voyante se repérait de loin et permettait aux responsables des opérations de dynamitage de s’assurer que tous les plongeurs étaient remontés avant de faire exploser les charges (une fois le casque retiré, le bonnet rouge devenait ainsi très visible).

Le bonnet est également indispensable afin de pouvoir actionner la soupape sans se blesser et se protéger du froid.

MODE DE FONCTIONNEMENT DU SCAPHANDRE

Le plongeur, enfermé dans son scaphandre, reçoit de l’air depuis la surface au moyen d’une pompe et d’un tuyau. Le volume d’air à l’intérieur du scaphandre varie de manière permanente car il subit la pression de l’eau, mais aussi l’accumulation de l’air envoyé depuis la surface au moyen de la pompe. Pour éviter l’éclatement du vêtement imperméable, une soupape de surpression est placée sur le casque. L’abondance de l’air à l’intérieur du vêtement oblige le plongeur à être lesté pour rester au fond de l’eau. Ce lest est constitué de poids, un ventral et un dorsal, mais aussi de chaussures à semelles de plomb. Sur le casque qui enveloppe la tête du plongeur se trouvent les hublots pour la vision et la soupape de surpression d’air. Le casque est vissé sur la pèlerine qui a pour fonction de soutenir les lests de plomb ventral et dorsal et de fixer hermétiquement le haut du vêtement imperméable.

Film de l'US Navy sur l'utilisation de l'habit du scaphandrier

L'ÉQUIPEMENT DU SCAPHANDRIER

LE CASQUE

Le casque est la pièce maîtresse de l'équipement, en cuivre et en bronze, et se compose de deux parties principales: le casque proprement dit, partie supérieure comprenant des hublots, l'arrivée et l'évacuation de l'air, puis la partie inférieure appelée pèlerine reposant sur les épaules de l'utilisateur. Dans les casques dit "3 boulons", l'étanchéité avec l'habit se fait entre le casque et la pèlerine.

Un "truc" utilisé par les anciens : on dispose sur les épaules des chaussettes (propres de préférence !) afin d’amortir le poids de la collerette et celui du casque. Un coussin d'épaules est tout de même préférable...

On obture le casque en y vissant la vitre du hublot facial (il paraît que certains aides facétieux s’amusaient à y introduire une petite mouche juste avant sa fermeture, le malheureux devant ainsi endurer ses bourdonnements affolés durant toute son immersion !).

A noter que le hublot facial dévissable est appelé "la glace".

LE VÊTEMENT

Le scaphandrier doit tout d’abord enfiler toute une panoplie de sous-vêtements en laine : chaussettes et "pyjama", d’une part afin de se protéger du contact quelque peu rugueux du vêtement, d’autre part pour se prémunir du froid et enfin pour limiter la création de buée due à la transpiration sur les hublots du casque.

Il est constitué d'une feuille de caoutchouc interposée entre deux couches de toile croisée et tannée. Les extrémités des manches possèdent des manchettes de caoutchouc qui assurent l'étanchéité au niveau des poignets. On appelle ces vêtements "peau de bouc".

Mais d'où provient l'origine du nom "peau de bouc" ? Plusieurs pistes sont évoquées... A vous de choisir celle qui vous convient !

La première:

C'est l'odeur désagréable qui pouvait y régner à l'intérieur.

La seconde:

Au XVIII siècle, il n'y avait pas de caoutchouc pour fabriquer les combinaisons. Ces dernières étaient en cuir, mais quel cuir ? Du bouc ?

La troisième:

Nous remontons à l'époque de Cabirol, premier fabricant français de scaphandres. Le blason familial de ce fabricant comporte un bouc (ou une autre bestiole à peu près semblable !), on peut donc supposer qu'il existe un lien.

La quatrième:

Durant l'antiquité, on utilisait des outres (sac) en peau de bouc (de chèvre, de cochon, de bœuf ou de veau), cousue par un bout et dont toutes les coutures étaient soigneusement bouchées avec de la poix, de manière que l’on pût y renfermer des liquides, ou les gonfler d’air. Elles permettaient notamment de maintenir les marchandises au sec lors de franchissement de cours d'eau ou de renforcer la flottabilité des radeaux utilisés pour débarquer les marchandises des bateaux. Les pattes constituaient les poignées et le cou, le déversoir, la forme fait penser au vêtement du scaphandrier.

La cinquième:

Superstitions et croyances, les marins pensaient que d'accrocher une peau de bouc en haut du grand mât d'un bateau leur permettrait de faire un voyage sans encombre. La peau du bouc possède des vertus protectrices.

La sixième:

On appelle "Peau de bouc" à bord des bâtiments de la Marine nationale, le cahier sur lequel on inscrit les punitions. On peut penser que le fait d’enfiler le vêtement, opération assez difficile qui précède une incursion dans un domaine redouté, équivaut à une punition.

Se glisser dans la peau de bouc elle-même, et ce n’est pas une mince affaire : pour y parvenir, deux aides remontent le vêtement de bas en haut tandis que le scaphandrier se laisse « glisser » au fond , un peu comme on enfile un gant. Si les manchons d’étanchéité sont trop serrés, on utilise les tire-manchettes qui facilitent le passage des poignets, tout en arrachant les poils…

On ne meurt pas d'un trou à son pantalon, sauf si l'on est scaphandrier.

Citation de Henri de Toulouse-Lautrec.

LES CHAUSSURES

Les chaussures demeurent l'un des éléments caractéristiques de l'équipement des scaphandriers à casque. Généralement en cuir, comportant une forte semelle de plomb et pesant de 7 à 8 kg chacune. Elles servent à la fois au lestage et à l'équilibre de l'utilisateur.

LES PLOMBS

Pour annuler la flottabilité due à l'important volume d'air contenu dans l'habit (air nécessaire pour équilibrer la pression hydrostatique). Le scaphandre ne peut se contenter de ses semelles de plomb. Le port d'un lest supplémentaire s'avère indispensable et l'on fait rajouter, sur la poitrine et dans le dos, des galettes de plomb pesant environ 18 kg chacune. Souvent le plomb de poitrine pèse 2 kg de plus que le dorsal afin de faciliter la progression du scaphandrier penché vers l'avant. Accrochés sur les ergots de la pèlerine, les plombs sont reliés entre eux par une sangle ou une corde passant entre les jambes du scaphandrier. Les plombs sont appelés "les Médailles" et la sangle passant entre les jambes "Trousse-Couilles".

Ainsi, ce n’est pas moins de 80 kg que le scaphandrier doit supporter avant sa mise à l’eau, ce qui explique sa démarche quelque peu pesante …Heureusement, une fois immergé, Archimède* viendra à son secours et il pourra retrouver quelque mobilité pour effectuer ses travaux .

Le "dégraissage" est le terme utilisé pour le retrait des médailles, opération interdite en cours d'immersion selon les recommandations du fabriquant. Il y a bien évidemment le risque de faire une remontée ballon décrite dans les risques du métier.

* "Tout corps plongé dans un fluide au repos, entièrement mouillé par celui-ci ou traversant sa surface libre, subit une force verticale, dirigée de bas en haut et opposée au poids du volume de fluide déplacé ; cette force est appelée poussée d'Archimède.".

LA CEINTURE ET LE POIGNARD

Le scaphandrier s'équipe d'une large ceinture de cuir avec une boucle en bronze, servant principalement à accrocher le poignard. Le poignard du scaphandrier sert moins à se défendre contre la faune aquatique qu'à couper les cordages ou des morceaux de filets faisant obstacle à sa progression.

L'ALIMENTATION EN AIR

De nombreux appareils ont vu le jour en fonction de l’évolution de la technologie. Il existe plusieurs modèles de pompes que l’on peut classer en trois catégories : Les pompes à bringuebales, avec pistons à joints hydrauliques ou rondelles Giffard et les pompes à volants avec pistons à rondelles Giffard. La pompe à joints hydrauliques est mise au point par Benoît Rouquayrol et Auguste Denayrouze en même temps que l’appareil plongeur, en 1865, et reste couramment utilisée jusque dans les années 1920. La pompe à deux corps à piston Giffard est plus récente (1888). La pompe à bringuebale sera utilisée jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale. La pompe à trois corps à volant symbolise le matériel typique du scaphandrier pour les dernières générations. Elle a une capacité supérieure à la pompe à bringuebale.

Extrait Tintin et Rackham le Rouge, source http://www.tintin.com

Peu après la Seconde Guerre mondiale, on voit apparaître un nouveau système d’approvisionnement en air pour les scaphandriers : Le compresseur d’air basse pression. Il se généralise au sein de la "Marine" avant d’être utilisé par les entreprises civiles. Par la suite on perfectionne le système par l’emploi de bouteilles d’air comprimé à une pression de 200 kg/cm2.

LA CORDE DE SÉCURITÉ

La corde de sécurité entourant la taille du scaphandrier a permis bien souvent, si ce n’est de sauver le scaphandrier, du moins de le tirer d’une situation délicate. Plus que tout autre, il n’est pas exagéré de dire, que dans certains cas, "la vie de l’homme qui plonge ne tient qu’à un fil".

LA COMMUNICATION

La corde à signaux, ou corde de sécurité, ou encore "guide de corps", attachée autour de la taille du scaphandrier et maintenue en surface par un homme de confiance appelé lui-même "guide", reste pendant de nombreuses années la meilleure façon d’établir une communication entre le fond et la surface. Un code, établi en fonction du nombre de tractions exercées, détermine les besoins du plongeur (exemple: deux tractions effectuées par le scaphandrier signifient qu'il désire plus d'air). Le code se limite à quelques messages et ne fonctionne que si la corde est suffisamment tendue et si celle-ci n’est pas entravée par un obstacle (à l’intérieur d’une épave par exemple).

En 1874, Louis Denayrouze met au point un appareil acoustique au moyen d’un tuyau d’un diamètre intérieur de 20 millimètres, renforcé par une spirale métallique. Ce tuyau est fixé au raccord prévu à cet effet sur le dessus du casque. Il se termine à l’autre extrémité par un cornet dont le guide se sert à la fois pour parler et écouter. Celui-ci, lorsqu'il désire s’adresser au scaphandrier, siffle dans le cornet pour entamer le dialogue. Aussitôt on stoppe la pompe et le plongeur ferme la soupape d’évacuation, car le bruit de l’air qui s’en échappe couvre les sons et rend toute conversation inaudible. Malheureusement, le système de tuyau acoustique n’est plus efficace au-delà de 20 m de profondeur.

La mise au point du téléphone sous-marin s’avère plus pratique pour les utilisateurs tant au niveau de la rentabilité du travail (il n’est plus nécessaire de remonter pour faire part de ses besoins) que de la sécurité, renforcée par un contact permanent avec la surface d’où proviennent les secours en cas d’accident.

Les anciens systèmes ne permettaient pas d’écouter et de parler en même temps. Par défaut, on écoutait le scaphandrier, puis on pressait un bouton pour lui répondre ( un peu comme un interphone).

Le perfectionnement des téléphones a permis de converser avec les scaphandriers, mais aussi de leur donner la possibilité de communiquer entre eux.

A ce propos, il faut signaler qu’avant ce progrès technique, il était possible aux scaphandriers de parler en s’approchant l’un de l’autre jusqu’à ce que leurs casques soient en contact. Ils prononçaient des mots à haute voix et les sons passaient d’un appareil à l’autre, permettant des échanges verbaux restreints mais efficaces.

L’ensemble des améliorations techniques en matière de communication a permis au scaphandrier "Pieds-lourds" de résister longtemps face au scaphandre autonome.

LES RISQUES

Les utilisateurs des cloches à plonger se sont aperçus à leurs dépens, que les séjours au fond de l’eau génèrent parfois des phénomènes physiologiques tels que maux de tête, saignement de nez, douleurs aux tympans et des démangeaisons peu banales. La mise au point du scaphandre à casque permet des interventions beaucoup plus profondes mais conjointement apparaissent des troubles parfois fort graves, puisque la témérité et l’ignorance de plusieurs scaphandriers leur coûte la vie.

Film historique sur les plongeurs d'éponges, commentaire de Léon Zitrone !

"On ne paie qu'en sortant". Ce proverbe couramment employé par les scaphandriers résume avec une certaine fatalité les risques de leurs activités. Les problèmes liés à la mise sous pression sont, grâce à des savants comme Paul Bert et John Scott Haldane, peu à peu résolus; tout au moins sur le plan théorique car au stade de la pratique il faut tenir compte des prescriptions. Les règles son en général respectées dans les marines militaires, il en va tout autrement dans les entreprises privées. Par manque d'information, inconscience et surtout nécessité de productivité, les limites et les précautions de remontée ne sont pas toujours respectées, loin de là. Les scaphandriers paieront, durant de nombreuses années, un lourd tribut pour le non respect des lois de la profondeur.

L'ignorance des scaphandriers, extrait du "Monde du Silence" du commandant Cousteau, source http://www.cousteau.org

LE COUP DE PRESSION

Le scaphandrier reste longtemps au fond, trop longtemps, et il n’observe pas la durée réglementaire des paliers lors de la remontée. C’est l’accident de décompression. Pour avoir plus d'explications, voir : "Physiologie de la plongée".

L'ennemi du scaphandrier, c'est l'air qui le fait vivre en plongée.

Citation de Paul Bert

LE COUP DE VENTOUSE

Les anglais l’appellent le "squeeze" qui veut dire étreinte. Rarement bénin, souvent mortel, est de loin l’accident le plus redouté des scaphandriers. Phénomène inverse de la "remontée en ballon", le "coup de ventouse" est dû à une chute brutale du scaphandrier en immersion. Cette chute s’accompagne évidemment d’une augmentation de la pression hydrostatique qui ne saurait être compensée assez tôt par les servants de la pompe.

LA REMONTÉE BALLON

On appelle "remontée ballon", toute remontée du scaphandrier ne pouvant être contrôlée. Elle demeure la conséquence d’un déséquilibre entre la pression d’air à l’intérieur du scaphandre devenant plus importante que la pression hydrostatique, le poids du scaphandrier et de son matériel. Dans la plupart des cas, cette différence est due à une trop grande différence d’air envoyée par la pompe ou un mauvais réglage de la soupape d’évacuation.

Film humoristique, problème de soupape

LES DANGERS DE LA FAUNE SOUS-MARINE

Ce sujet doit être abordé pour démythifier que l’homme séjournant dans la mer soit en proie aux morsures de requins mangeurs d’hommes, si ce n’est les tentacules étouffants des pieuvres dissimulées dans les grottes les plus obscures.

Les requins, par exemple, étaient particulièrement redoutés chez les plongeurs nus pratiquant la pêche aux éponges ou du corail sur les côtes orientales de la Méditerranée. Avec l’apparition du scaphandre à casque, ces accidents se raréfient et il semble que l’individu utilisant un tel matériel soit moins vulnérable : volume plus important, évacuation permanente de bulles d’air, dissuadent vraisemblablement les éventuels agresseurs.

La faune sous-marine n’est pas un danger important pour le scaphandrier. Les explosifs, les élingues récalcitrantes, les ferrailles enchevêtrées et les lois régissant la vie en pression restent bien plus préoccupants.

LE PLONGEUR LUI-MÊME - LA PANIQUE

C’est une réponse inadaptée à une situation stressante ressentie par le plongeur comme imprévisible, dangereuse ou encore incontrôlable. Elle se caractérise par la perte de confiance en soi et il s’ensuit une perte des moyens physiques et intellectuels. L’individu saisi de panique est dans l’incapacité de se maîtriser, il y a perte de contrôle de la situation. Les facteurs déclenchant la panique sont nombreux, parmi les plus communément rencontrés on peut citer :

  • la perte ou la non maîtrise de son matériel.

  • le manque de visibilité.

  • les conditions météorologiques.

  • la méconnaissance du site de plongée.

  • la perte d’un équipier.

  • le sentiment de ne pas pouvoir faire face aux efforts physiques nécessaires à la maîtrise de la situation.

  • la situation vécue non conforme à la représentation mentale que c’était faite le plongeur.

  • etc.

LA FORMATION

Les premiers n’ont pas de formation de scaphandrier, car aucun enseignement spécifique ne leur est dispensé, si ce n’est quelques rudiments de l’utilisation pratique de l’appareil. Il faut attendre les années 1860 pour que la "Marine" crée des cours de scaphandriers au sein de ses ports. La formation des scaphandriers n’est pas à vocation guerrière. On trouve au sein d’un arsenal, des scaphandriers civils et militaires. Ils sont tous formé par les écoles de scaphandrier de la "Marine" mais leurs rôles sont différents. Le scaphandrier militaire reste un "mécanicien-Chauffeur" embarqué, effectuant des plongées au port ou en pleine mer dans le cadre de visites et réparations sur la carène du bâtiment. Il récupère également les objets appartenant au bord. La "Direction des Mouvements" des ports compte également parmi leur personnel des scaphandriers ; ils peuvent être amenés à réaliser des travaux de renflouements, de recherche ou d’entretien. Souvent, ces hommes sont d’anciens embarqués ayant obtenu un poste à terre. Le scaphandrier civil, quant à lui, réalise des travaux dits "hydrauliques" : réparation des quais, portes de bassins, dévasage, nettoyage de rade, constructions de digues.

Formation des scaphandriers de l'US-NAVY

LE CHEMIN DES GRANDES PROFONDEURS

LA NARCOSE À L'AZOTE OU "L'IVRESSE DES PROFONDEURS"

Au début du XX siècle, les limites de la tolérance de l'organisme à l'oxygène sous pression sont bien définies, les tables de décompression de Haldane se sont répandues à travers le monde. Les scaphandriers atteignent couramment des profondeurs comprises entre trente et cinquante mètres. On ne descend pas plus bas parce que dans la plupart des cas le débit des pompes deviendrait insuffisant au-delà de cette profondeur. Les durées de séjour au fond sont courtes car, à la remontée, il faut effectuer des paliers de décompression en pleine eau, accroché à une corde, ce qui est inconfortable et dangereux pour peu qu'il y ait du courant et qu'en surface le navire-base s'agite dans la houle.

Assez rapidement apparaît alors un phénomène jusque là insoupçonné: au-delà d'une certaine profondeur, en moyenne entre quarante et cinquante mètres, les scaphandriers ressentent des troubles étranges. Ils constatent une sorte de dégradation mentale. Leur raisonnement, leur mémoire immédiate, leurs facultés de perception, particulièrement la vue, sont perturbés. Un retard dans l'enchaînement des processus mentaux devient sensible. Ces symptômes sont variables selon les individus; ils se manifestent plus ou moins rapidement et sous des formes différentes.

On constate en outre un phénomène d'accoutumance. Le plongeur entraîné se rend de mieux en mieux compte de son état et peut repousser les limites du seuil de dégradation. En fait, il supporte sans doute mieux les troubles induits.

Dès le retour en surface les troubles disparaissent et ne laissent aucune trace. Dans une certaine mesure, les symptômes sont comparables à ceux que provoque l'alcool, d'où l'appellation "d'ivresse des profondeurs".

"La survie dépend de sa capacité à garder sa lucidité..."

Citation de Bernard Gardet (Directeur scientifique de la COMEX)

L'origine de cette toxicité, car c'est bien ainsi qu'on peut nommer le phénomène, resta inexpliquée pendant une vingtaine d'années. C'est un physicien américain, E. Thompson, qui, entre 1925 et 1930, proposa une explication: les troubles ressentis par les plongeurs seraient dus à l'azote contenu dans le gaz respiratoire, qui deviendrait toxique à partir d'une certaine pression. Quant aux effets, ils s'apparentent à ceux d'un anesthésique.

Les premières hypothèses visant à expliquer le mécanisme de la "narcose à l'azote" sont avancées par le physiologiste américain Behnke en 1935. Il pense que le facteur essentiel, lorsque l'on étudie la toxicité d'un gaz neutre, est sa solubilité plus ou moins élevée dans l'eau (le sang, les tissus aqueux) et dans les graisses (le tissu cérébral, la moelle épinière)... C'est ce facteur qui déterminerait l'action du gaz considéré sur les tissus nerveux - théorie ayant déjà servi à expliquer les effets d'anesthésiques, l'éther et le chloroforme en particulier.

Encore aujourd'hui, il s'agit d'une énigme de la science...

LA PLONGÉE AUX MÉLANGES

Dans les années 1920, ce que retiennent les chercheurs est que si l'on veut aborder de plus grandes profondeurs et mettre le plongeur à l'abri (complètement ou partiellement) de la narcose, il faut modifier la composition du gaz qu'il respire.

Dès 1924, la marine américaine se lance dans l'utilisation de l'hélium, suivant les recommandations de Thompson et de Behnke. Les avantages de l'hélium sur l'azote apparaissent clairement en ce qui concerne la narcose. Deux succès presque immédiats l'attestent: d'abord en 1930, la première plongée à cent mètres, ensuite en 1937 à cent vingt-six mètres.

Les scaphandriers confirment qu'à cette profondeur la narcose qu'ils ont connue en plongée lorsqu'ils respiraient de l'air disparaît complètement et qu'en outre la mécanique ventilatoire des poumons est infiniment plus aisée. L'air qu'on respire à cent mètres de fond est épais comme une soupe, le mélange d'hélium et d'oxygène a la fluidité d'un bol d'air de montagne.

Si l'invention du scaphandre de Siebe, les travaux de Bert et Haldane ont donné le coup d'envoi de la plongée moderne en permettant aux hommes d'accéder aux moyennes profondeurs, c'est bien la découverte des mélanges respiratoires à base d'hélium et d'oxygène qui leur a ouvert le chemin des grandes profondeurs.

Cependant, l'hélium présente des inconvénients qu'il faut apprendre à surmonter. Sur le plan physique on s'aperçoit que ce gaz possède une extrême capacité de diffusion, ce qui pose des problèmes nouveaux d'ordre physiologique (sa dissolution dans les tissus n'est pas la même que celle de l'azote) et d'ordre mécanique (étanchéité des récipients, robinets, tuyautages, câbles électriques...)

Les physiologistes s'attaquent alors à la mise au point de nouvelles tables de plongée et les techniciens modifient les équipements en conséquence. En outre, l'hélium n'a pas le pouvoir isolant thermique de l'air. Cela conduit à reconsidérer le problème de la protection du plongeur contre le froid. Enfin, il déforme la voix à un point tel qu'à partir d'une certaine profondeur, de l'ordre de cent mètres, elle devient à peu près incompréhensible. C'est ce qu'on appellera plus tard "l'effet Donald Duck".

L'effet "Donald Duck" , extrait "Le monde sans soleil" * du commandant Cousteau, source http://www.cousteau.org

En 1963, Jacques-Yves Cousteau et son équipe entament une expérience inédite : vivre un mois durant, dans un village sous-marin aménagé dans la Mer Rouge, sur les côtes du Soudan. C'est l'expérience dénommée Précontinent II.

Les palliatifs seront longs à être mis au point. Il faudra attendre les années 1970 pour que des solutions satisfaisantes soient trouvées.

LES TOURELLES DE PLONGÉE

Les scaphandres s'améliorent. Les tourelles de plongée, inventées en Angleterre par Robert Davis et fabriquées par la célèbre firme Siebe-Gorman, commencent à se généraliser. L'idée est simple et séduisante: pour éviter aux scaphandriers les longs et pénibles paliers de décompression qu'ils doivent subir en pleine eau accrochés à une corde, un caisson cylindrique en acier, ouvert à la partie basse et en équipression avec le milieu extérieur, les accompagne dans leur remontée.

Le scaphandrier pénètre à l'intérieur de cet habitacle qui joue le rôle d'un ascenseur; un aide le débarrasse de son casque, puis il y effectue ses paliers de décompression en toute sécurité et dans un confort relatif. Pendant toute la durée du travail, la tourelle est maintenue à quelques mètres au-dessus du fond, et elle peut aussi servir de refuge en cas d'incident.

LES TOURELLES D'OBSERVATION

Les tourelles d'observation sont nées en Angleterre. C'est Robert H. Davis qui construisit la première en 1912. De quoi s'agît-il ?

Tout le monde s'accorde à reconnaître alors qu'un scaphandrier peut travailler sous la mer, certes, mais pendant des temps relativement brefs et à des profondeurs courantes ne dépassant pas une quarantaine de mètres. Au-delà, cela reste possible, mais l'opération devient rapidement dangereuse en raison de la toxicité, croissante avec la profondeur, du mélange respiré.

Quelques bons esprits se sont dit que la solution pour rester longtemps sous la mer était de protéger le corps de l'homme dans une enceinte résistant à la pression et lui permettant de ce fait de respirer de l'air atmosphérique. Quel serait dans ce cas le volume le mieux adapté ? Une sphère, un cylindre, ou un assemblage de sphères et d'éléments cylindriques. La tourelle de Davis est un cylindre d'acier, muni de hublots, un peu plus grand qu'un homme, qu'on descend dans l'eau suspendu au bout d'un câble sous la grue d'un navire.

Le passager respire librement l'air contenu dans l'enceinte et peut voir à l'extérieur dans les limites de la visibilité avoisinante. C'est très simple, bon marché et à la portée de n'importe quel "client". Une plongée en tourelle d'observation ne nécessite aucune espèce de formation préalable. Les possibilités d'action sont évidemment nulles, on peut seulement observer, ce qui n'est pas négligeable lorsqu'ensuite on est amené à diriger les travaux d'une équipe de scaphandriers. Et surtout, on peut dans cet équipage, descendre beaucoup plus bas qu'avec un scaphandre, sous réserve que la coque de la tourelle soit suffisamment épaisse, que le câble d'acier soit assez long et résistant et, bien entendu, qu'on dispose d'un éclairage vers l'extérieur.

En 1912, ce n'est pas le cas, mais dès les années 1920-1925 on saura construire de manière courante des lampes étanches. Le système se perfectionnera encore avec l'installation d'un téléphone sous-marin. C'est ce que fera l'ingénieur italien R. Galleazzi en 1930. Sa tourelle butoscopique est considérée comme un modèle du genre, elle est encore aujourd'hui utilisée dans le monde entier ! Son titre de gloire est d'avoir permis le relevage du trésor de l'Egypt.

Au mois de mai 1922, par un épais brouillard, un paquebot britannique, "l'Egypt" heurte un autre navire au large de Brest et coule par 130 mètres de fond. Ses cales contiennent pour 6 millions de dollars d'or et d'argent. L'attrait de ces six millions de dollars a valu, pendant des années, à la célèbre compagnie d'assurance, la "Lloyd's" londonienne maintes propositions de renflouement, toutes plus fantaisistes les unes que les autres. Mais la "Lloyd's," qui avait dû couvrir les dommages, était déterminée à retrouver l'épave. Le sauvetage fut long,la chambre au trésor était située dans les entrailles même du navire. Cela signifiait qu'il fallait faire sauter plusieurs épaisseurs de ponts. C'est depuis une tourelle d’observation que les opérations furent dirigées. C'est finalement quatre ans après le début des recherches qu'une benne télécommandée pénétra dans le trou et ramena le premier lingot d'or. Le dernier d'entre eux ne fut repêché que trois ans plus tard.  

Extrait tourelle d'observation, source http://www.cinecitta.com

LES SCAPHANDRES RIGIDES

La grande frustration qu'éprouvent les utilisateurs de tourelles d'observation, lorsqu'ils se trouvent sous la mer est d'être impotents, de ne pouvoir utiliser ni leurs bras ni leurs jambes. Il était inévitable que des inventeurs s'attachent à surmonter ce handicap.

Le but à atteindre était donc d'imaginer une cuirasse résistant à la pression, épousant le corps et les membres, et articulée de telle sorte qu'elle permette de mouvoir les bras et les jambes. Les difficultés métallurgiques et mécaniques étaient extrêmement difficiles à surmonter.

Des inventeurs dans ce domaine bien particulier de la plongée, il n'en manquera pas. Entre 1850 et 1920, on ne compte pas moins de trente modèles différents de scaphandres rigides qui apparaîtront sur le marché. Le plus souvent d'ailleurs, ils ne dépasseront pas le stade du prototype.

Les années passent et d'autres habits rigides, aux articulations plus ou moins complexes, font leur apparition. L'imagination des inventeurs trouve à s'appliquer avec progrès de la métallurgie, des techniques de découpage et soudage des métaux, de la tréfilerie qui permet de fabriquer des câbles d'acier souples et résistants. Les résultats restent généralement médiocres.

Les systèmes d'étanchéité laissent à désirer et l'on constate des entrées d'eau à l'intérieur des scaphandres. Elles ne pardonnent pas car l'air contenu dans l'enceinte close est à la pression atmosphérique alors que l'eau, elle, se trouve naturellement à une pression largement supérieure. Alors, le risque de remplissage de l'habit, et de noyade pour l'infortuné "chevalier cuirassé" du fond des mers, est grand. Aussi, y regarde-t-on à deux fois avant d'endosser ce vêtement d'acier qui est supposé protéger des effets de la pression et, en même temps, permettre de respirer en sécurité. Le gros problème réside dans les joints.

Même si l'étanchéité est correctement assurée, l'expérience prouve que, sous l'eau, l'articulation des bras et des jambes est de plus en plus dure sous les effets de la pression. L'action de saisir un objet, et surtout de se déplacer en mettant les jambes en mouvement, devient une épreuve de force que seuls des athlètes éprouvés peuvent affronter.

Comment utilise-t-on ces scaphandres qui donnent à ceux qui les portent des allures d'extraterrestres? A peu près de la même manière que les tourelles d'observation. On les descend dans la mer au moyen d'une grue, ou de nos jours d'un portique hydraulique. Qu'ils soient dotés ou non d'un système respiratoire autonome, ils restent donc toujours reliés à la surface par un gros câble porteur dans lequel est généralement inséré un fil téléphonique.

John Turner était un scaphandrier de Philadelphie qui a établi un record du monde de plongée en 1920, en plongeant à 110 m près de Boston. C'est à un mécanicien Charles Jacksa, que l'on doit ce scaphandre qui pèse plus de 180 kilos. John Turner rechercha sur la côte d'Irlande 30 millions de livres d'or qui se trouvaient à bord d'un navire torpillé.

Lorsqu'ils atteignent le fond, ils retrouvent un semblant d'autonomie de mouvements, mais, on s'en doute, leur agilité n'a aucun point commun avec celle d'un quelconque animal aquatique. Ce sont des monstres cuirassés qui offrent la possibilité, comme dans une tourelle d'observation, de décrire ce qu'on voit, de diriger une benne manœuvrée depuis la surface, et occasionnellement de faire quelques pas et quelques gestes simples pour peu que la force des muscles le permettent. En contrepartie de cette lourdeur, et des risques inhérents à ce genre d'exercice, entrées d'eau en particulier, l'homme n'a pas à craindre les effets de la pression. On peut renouveler les séjours au fond indéfiniment si l'on dispose d'une relève, et la terrible contrainte des paliers de décompression disparaît.

LA RECHERCHE DE L'AUTONOMIE

LE SCAPHANDRE AUTONOME DE BOUTAN

Dès le début du XX siècle, on cherche à libérer le scaphandrier du tuyau d'air qui le relie à la surface et le limite dans ses déplacements. Boutan propose en 1915 un appareil destiné à rendre le scaphandrier totalement indépendant. Cette invention intéresse aussitôt la Marine qui envisage son utilisation à bord des sous-marins, non seulement pour remédier depuis l'extérieur à une éventuelle avarie par "sassage" d'un scaphandrier, mais également dans un but offensif, puisque l'appareil ne doit théoriquement pas produire de bulles d'air et de ce fait ne doit pas pouvoir être repéré depuis la surface.

Le scaphandre autonome de Boutan est un appareil portatif qui supprime la pompe d'alimentation et le tuyau d'air. Le fonctionnement de l’appareil serait trop long à expliquer ici, mais ce qu’il faut retenir est qu’il s’agit d’un des tout premiers systèmes de plongée à circuit fermé à recycleur d’air.

La fabrication en série d'appareils Boutan, la formation du personnel susceptible de I ‘utiliser, la modification des sas de sous-marins entraîneraient de lourdes dépenses et l'époque ne s'y prête pas. L'ère des nageurs de combat et des opérations sous-marines offensives n'est pas encore arrivée.

En cas d'utilisation pour un travail de longue haleine, l'appareil Boutan est beaucoup plus encombrant que le scaphandre classique et procure une gêne dans les mouvements; il paraît en effet difficile de progresser sans risque d'accrochage à l'intérieur d'une épave avec un tel harnachement. De plus, un travail long et pénible demande une quantité d'air pur importante et régulièrement renouvelée; or, les durées de séjour en immersion autorisées par l'appareil sont plus courtes qu'avec une alimentation traditionnelle par pompe à bras.

Apparemment fiable, quoique fragile, le scaphandre autonome de Boutan n'a donc pas l'utilité qu'on pouvait en attendre. Son emploi reste au stade des Commissions d'expériences de la Marine, il ne sera pas commercialisé à grande échelle.

LES HEURES DE GLOIRE

Extrait des renflouements après la seconde guerre mondiale, source http://www.cinecitta.com

A la fin de la seconde guerre mondiale, les destructions opérées par les alliés au cours des hostilités, ou celles effectuées par l’occupant en battant retraite, laissent les ports dans un état de désolation inimaginable. Des milliers de navires ou d’installations portuaires sont détruits et encombrent les fleuves, les ports et rades, gênant considérablement, pour ne pas dire paralysant, les accès par voie maritime. Des centaines de scaphandriers travailleront sur des chantiers particulièrement difficiles.

Durant la seconde guerre mondiale, Hitler lança l’opération « Lila », qui avait pour buts d’une part de s’emparer de la flotte française mouillée dans la rade de Toulon afin d’éviter que celle-ci ne soit mise à la disposition des alliés et d’autre part de faire de Toulon une base puissante en Méditerranée pour les sous-marins de la « Kriegsmarine ». (Le gouvernement français de Pétain ayant signé l’armistice avec l’Allemagne le 22 juin 1940, l’invasion des allemands dans cette zone était une violation du traité). Devant l’impossibilité de fuir en raison du blocus des allemands qui avaient placé des mines magnétiques sous-marines à l’entrée de la rade, positionné des « U-boots » un peu plus au large, en raison également du manque de carburant et de marins, l’amiral De Laborde décida de saborder l’entier de sa flotte pour éviter que celle-ci ne soit prise par l’ennemi. Sur les 173 bâtiments, seuls 5 ont pu être récupérés par les allemands. Cette concentration de navires coulés engendra un travail titanesque de renflouements, notamment pour les scaphandriers, considérés comme des héros.


LA FIN DU RÈGNE

Pendant les dix années qui suivent la Première Guerre mondiale, c'est le grand calme sous la mer. Les scaphandriers se livrent alors à des tâches fastidieuses et sans gloire dans le fond des ports.

En 1926, les Français qui s'étaient assoupis depuis l'époque de Rouquayrol et Denayrouze, de Paul Bert, entrent à nouveau dans la course, en la personne de Yves Le Prieur, capitaine de corvette de la marine française. Il y a vingt ans déjà qu'il a plongé à diverses reprises avec le scaphandre à casque en service dans la "Marine" et qu'il en a mesuré les contraintes. Il met au point avec Fernez, un ingénieur de ses amis, un appareil respiratoire autonome. Il se compose d'une bouteille d'air comprimé de trois litres à 150 kg/cm2 de pression (utilisée dans les garages pour regonfler les pneumatiques des voitures) et d'un détendeur d'où part un tuyau souple aboutissant à un embout que le plongeur serre entre ses dents.

En 1930, le commandant De Corlieu invente les palmes natatoires.

En 1933, Yves Le Prieur modifie légèrement son appareil : il remplace le pince-nez et les lunettes binoculaires par un masque recouvrant toute la face et il augmente la taille de la bouteille d'air. L'autonomie double. La "Marine" adopte officiellement le scaphandre Le Prieur en 1935 et celui-ci fait figure de pionnier du monde sous-marin. Pourtant, si l'on y regarde de plus près, l'invention de Le Prieur en elle-même n'est pas marquée du sceau du génie. Son appareil est rudimentaire, il exige un réglage quasi permanent et il fonctionne en fait pratiquement en débit continu ; ce qui implique un énorme gaspillage d'air et une gêne pour la vision car les bulles s'échappant sur les bords du masque viennent souvent juste devant la vitre.

L'appareil de Rouquayrol et Denayrouze, vieux d'un demi-siècle, était en réalité beaucoup plus évolué, mais, paradoxe du progrès qui ne suit pas toujours un cheminement linéaire, cet appareil-là, tout le monde l'avait oublié.

Et puis vient Jacques-Yves Cousteau. Il a des idées à revendre, une imagination créatrice que n'arrêtent pas les contingences, et une vitalité débordante, initié par son camarade Taillez, officier de marine comme lui. Avec l’ingénieur Emile Gagnan, ils mettent au point des appareils autonomes qui permettent à partir de 1943, d’effectuer des plongées en toute sécurité avec ce nouveau système.

Les premiers tests du scaphandre autonome, source http://www.cousteau.org

A la fin de la guerre, les côtes sont infestées de mines marines de tous type. La destruction, la neutralisation de ces mines devient urgente pour la reprise des activités économiques et maritimes du pays (commerce, pêche, navigation). Des équipes de déminage sous-marins sont formés pour intervenir sur tous les engins de guerre. Ces plongeurs sont appelés "scaphandriers-démineurs". Le matériel utilisé est assez hétéroclite et varie suivant le type d'intervention. Le scaphandre à casque de type "Pieds-lourds" est utilisé pour le déminage classique sur des mines à orin ou mines de plages de type K.M.A. Pour des interventions sur des mines acoustiques, magnétiques ou à influence, les appareils utilisés sont de type recyclage de gaz ou à circuit fermé. Sur 1400 mines mouillées (référence, archives allemandes) plus d'un millier avait été détruites, sans compter celles qui avaient pu sauter spontanément. Il fallait donc tout ratisser sur ces centaines de kilomètres carrés par fonds divers dont des dizaines de kilomètres carrés par fonds de roche. Pour ces fonds rocheux il fallait aller voir en utilisant des scaphandriers, parmi lesquels, seuls les plongeurs autonomes, pouvaient avoir un rendement efficace.

La plongée en scaphandre autonome avait désormais conquis ses lettres de noblesse et entra dans les mœurs. Le remplaçant du scaphandre "Pieds-lourds" voit ainsi le jour, mais il faudra encore 35 années pour le détrôner.

La fin du règne des scaphandriers, extrait du "Monde du Silence" du commandant Cousteau, source http://www.cousteau.org

Il y a des avantages indéniables du scaphandre à casque par rapport au scaphandre autonome de l'époque:

  • Une bonne assise pour travailler.

  • Confort: Les mâchoires ne sont pas soumises à la contraction due au maintient de l'embout en bouche car on respire par le nez et la bouche.

  • Protection: Le visage n'est pas en contact avec le milieu environnant.

  • Sécurité: La déshydratation du plongeur est limitée car il peut aussi bien respirer par le nez que par la bouche. Le refroidissement est limité car le visage du plongeur n'est pas au contact de l'eau. Si le plongeur est victime d'une perte de connaissance, le risque de se noyer est moindre car il peut continuer à respirer.

  • Moyens de communication sous-marine: Les scaphandriers peuvent facilement communiquer entre eux et avec ceux restés en surface.

Les équipements des scaphandriers de nos jours reprennent les avantages évoqués ci-dessus (Voir: "Les scaphandriers de nos jours").

LES DERNIERS "PIEDS-LOURDS"

A partir des années 50, c’est-à-dire après la grande période des renflouements, tous les scaphandriers n’ont pas pu continuer ce métier, loin de là. Beaucoup ont dû arrêter suite à des accidents qui leur interdisaient définitivement la plongée, d’autres ont cherché des emplois plus stables ou sédentaires, pour différentes raisons, principalement familiales.

De plus, le nombre d’épaves à renflouer diminua considérablement, ce qui nécessita une reconversion pour bon nombres d’individus qui avaient travaillé au dégagement des ports. Cette profession régresse, au point que l’on ne forme plus de jeunes scaphandriers.

L’avènement du scaphandre autonome, son coût moins élevé, ses besoins moindres en personnel d’assistance, et surtout la plus grande mobilité qu’il offre à son utilisateur fait mettre au placard le casque de cuivre et les semelles de plomb. Seuls quelques anciens continuent d’exercer le métier avec le matériel traditionnel, ne voulant en aucun cas faire « la grenouille », comme ils disent.

Avec l’évolution de la technologie et des matériaux, le scaphandrier s’allège et se chausse parfois de palmes. Il garde selon la nature des travaux à effectuer, une dépendance avec la surface pour ce qui est de l’alimentation en air et de la communication, mais à présent, il peut se mouvoir plus facilement.

Le scaphandrier n’est donc pas mort mais il a évolué (Voir: "Les scaphandriers de nos jours").

DÉBUT DE LA PLONGÉE MODERNE

Au sortir de la guerre, la plongée en scaphandre autonome émerge des pratiques de pêche à la nage. La mise au point d’équipements, le développement de la plongée militaire puis professionnelle, facilitent la structuration d’une plongée de loisir, tout autant que la lente transformation des représentations des imaginaires sous-marins. Le temps des pionniers s’achève symboliquement avec la reconnaissance du Monde du Silence, palme d’or à Cannes en 1959.

L’appropriation de l’activité par des structures de loisir comme le Club Méditerranée accompagne la généralisation de la pratique. Une presse spécialisée se développe et promeut une "bonne pratique", concrétisée par la mise au point et la reconnaissance des brevets de plongée. Enfin, la plongée en scaphandre prend une dimension internationale avec la création de la C.M.A.S et ouvre grand la porte aux organismes commerciaux américains. Dans cette mise en musique de l’aventure sous-marine, Jacques- Yves Cousteau joue un rôle central. Personnage adoré ou haï, il est, de fait, une des clés du développement de la plongée militaire ; il est aussi celui qui transforme la représentation de l’univers sous-marin par sa mise en images ; enfin il propose très tôt une vision mondiale de la plongée.

Le commandant Cousteau et la Calypso, extrait du "Monde du Silence" du commandant Cousteau, source http://www.cousteau.org

Jacques-Yves Cousteau, né le 11 juin 1910 à Saint-André-de-Cubzac, en Gironde, et mort le 25 juin 1997 à Paris, est un officier de la "Marine nationale française" puis un explorateur océanographique.

Surnommé "le Commandant Cousteau" ou encore "le Pacha", il est connu pour avoir perfectionné avec Émile Gagnan le principe du scaphandre autonome, ou détendeur, pierre fondatrice de la plongée sous-marine moderne.

Ses explorations sous-marines en tant que commandant de la Calypso, ainsi que ses films et documentaires télévisés ont permis au grand public de découvrir le monde de la mer et ses mystères.

Les films de Jacques-Yves Cousteau ont permis au grand public de découvrir le monde de la mer et ses mystères,

Sources bibliographiques : "Les Pieds-lourds, histoire des scaphandriers à casque français","Etude sur l'évolution technique du scaphandre Cabirol et du régulateur Rouquayrol","Le jouet scaphandrier et son histoire de Jules Verne à nos jours"","Illustrated History of Russian Diving 1829-1940", "Scaphandriers ! Chronique de pionniers 1952-1963" avec l'accord de leurs auteurs. Un extrait de texte est tiré de la thèse de doctorat de M. Mascret Vianney.Un extrait du livre "Souvenirs de plongée" de Pierre Eric Deseigne.